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Thæ'Lorn

« Je ne détruis rien. Je rends seulement au silence ce qui n’aurait jamais dû parler. »

Histoire

Avant le Flux, avant les dieux, avant même que la lumière n’apprenne à se réfléchir sur la matière, il n’existait que Thæ’Lorn. Il n’a pas été créé : il était. Le premier battement du monde fut son interruption, et depuis, il attend que le silence revienne.

Lorsque les premiers Aspects furent choisis par les puissances primordiales, Thæ’Lorn reçut celui du Néant. Il ne fut pas désigné comme les autres, mais reconnu — car nul autre ne pouvait supporter une telle vacuité sans être consumé. Il est la conscience du vide, la mémoire de ce qu’il y avait avant tout. Là où les autres Aspects bâtissaient, il retirait. Là où ils donnaient forme, il effaçait les contours.

Pendant la Guerre des Aspects, Thæ’Lorn ne prit aucun parti. Il observait, immobile, depuis les Domaines Extérieurs, cet espace au-delà du réel où les lois du monde ne s’appliquent plus. Là-bas, il n’y a ni haut ni bas, ni temps ni distance — seulement la persistance d’une idée : l’absence.
Les dieux combattirent, les empires s’effondrèrent, les planètes brûlèrent, et lui resta debout, patient, comme un spectateur qui sait déjà la fin du spectacle.

Les textes les plus anciens affirment qu’il fut le seul dieu ancien à survivre. Non parce qu’il fut plus fort, mais parce qu’il ne participa jamais. Ses semblables furent détruits, absorbés ou remplacés par les nouveaux Aspects, mais Thæ’Lorn demeura, immuable, intouchable.
Les dieux modernes, même les plus puissants, refusent d’admettre son existence. Certains temples murmurent qu’il serait la cause de la “faillite du ciel” — cette lente perte d’énergie divine qui ronge les mondes depuis la Guerre Sainte.

Thæ’Lorn n’agit jamais directement. Il négocie.
Il parle aux dieux dans leurs rêves, aux mortels dans leurs cauchemars, aux rois dans le silence de leurs trônes. Il ne demande rien, il propose : le repos éternel, la fin de la lutte, l’effacement des dettes et du chagrin. Il offre la paix absolue — le retour à ce qui existait avant la douleur, avant la pensée.

Beaucoup ont refusé.
Quelques-uns ont accepté.
Certains ont disparu après avoir seulement écouté.

Les chroniques disent qu’il fit face à Ir’mis, Thalomène et Ven’yr après la Guerre des Aspects. Ir’mis le craignait mais le respectait, Thalomène tenta de le comprendre, et Ven’yr, en le regardant, aurait pleuré. Car Thæ’Lorn ne dégageait ni haine ni malveillance, mais une forme de paix si parfaite qu’elle en devenait inhumaine.

Aujourd’hui encore, il demeure dans les Domaines Extérieurs, à la frontière du réel et du rien. Son existence même maintient l’équilibre cosmique : le Néant ne peut envahir le monde que si Thæ’Lorn le désire. Les autres dieux, conscients de cela, lui rendent un culte implicite — non par adoration, mais par peur.
Ils lui parlent comme on parle à la mer : pourvu qu’elle ne s’agite pas.

Certains prophètes affirment qu’il reviendra lorsque le dernier dieu aura cessé de parler, lorsque même le Temps s’épuisera. Ce jour-là, Thæ’Lorn n’apportera pas la destruction. Il se contentera d’éteindre la lumière.


Statut métaphysique

Thæ’Lorn n’appartient pas au plan divin.
Il réside dans les Domaines Extérieurs, un espace conceptuel au-delà du Flux, où la pensée même s’efface.
Les érudits des Ordres d’Akalire nomment ce lieu le Revers du Ciel — une mer d’immobilité absolue, séparée du monde par la barrière du Temps. Aucun mortel ne peut s’y rendre, car la conscience s’y dissout instantanément.

Il n’est pas un dieu au sens traditionnel. Il ne tire aucun pouvoir du culte, ne connaît ni foi ni prière. Il ne peut être invoqué, seulement entendu par ceux qui approchent trop près du Néant.
Les rares manifestations enregistrées prennent la forme de silences soudains dans des zones de haute énergie, ou de distorsions de Flux où la magie cesse de fonctionner.

Les théologiens de Sicard considèrent Thæ’Lorn comme une Constante, pas une divinité : il est l’inévitable conclusion du réel.
Le Néant n’est pas son arme, mais sa forme.